19 janvier 1945 : "l'affaire Brasillach"

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Le procès de Brasillach commence le 19 janvier 1945 à 13 heures, le verdict est rendu le même jour, six heures plus tard. Le verdict est sans appel : « la mort ! »*. À sa demande, aucun témoin n'a été cité. Dans le public, une voix crie : « C'est une honte ! », d'autres : « Assassins ! » ; mais Brasillach, comme il se doit pour quelqu'un d'irrigué par les humanités et nourri de Corneille, répliqua : « C'est un honneur. »

Sur cette scène brève, quelques personnages apparaissent, emmenés par deux maîtres de l'éloquence, Jacques Isorni, le célèbre avocat, et Reboul, l'efficace procureur. Une anecdote nous rappelle que l'Histoire est un roman : Reboul est locataire d'un appartement qui appartient à Isorni, les deux hommes sont voisins et amis. On reconnaît Merleau-Ponty et Simone de Beauvoir dans les rangs du public. Alexandre Astruc, de Combat, et Madeleine Jacob, de Franc-Tireur, se tiennent sur les bancs de la presse. L’écrivain est fusillé le 6 février, au petit matin, dans un fossé du fort de Montrouge, en criant : « Vive la France quand même ! »

Normalien, compagnon de khâgne de Roger Vailland, ami de Claude Roy, qui partagea un temps ses idées, c'est un homme encore jeune avec déjà une solide réputation. Lecteur érudit, sensible, sentimental, journaliste infatigable, Brasillach se range dans le camp du fascisme français en rejoignant la rédaction de Je suis partout, hebdomadaire férocement antisémite, pro-nazi, dénonciateur de juifs et de résistants. Il aura cette phrase terrible : « Il faut se séparer des juifs en bloc et ne pas garder de petits. » Brasillach fait partie de cette élite intellectuelle bientôt fasciné par l'Allemagne nazie, sa violence, sa théâtralité.

Brasillach est coupable. C’est certain. Mais on s’étonne du caractère expéditif du procès et de la sanction appliquée : la mort. Cette résolution mise en œuvre par une cour d'exception fera de Brasillach le seul écrivain français exécuté à la libération. Certes, il n’est pas condamné pour ses opinions mais pour intelligence avec l’ennemi. Mais des zones d’ombre pèsent sur cette condamnation : ambiguïté de la magistrature, lacunes de l'accusation, limites de la défense, dignité de l'accusé à l'audience, responsabilité de l'intellectuel en temps de guerre, antisémitisme et fureurs de l'Histoire, peine de mort programmée.

Pourquoi le général de Gaulle lui a-t ’il refusé la grâce ? 

Pourquoi Simone de Beauvoir a refusé de signer la pétition demandant la grâce de Brasillach, alors que des intellectuels tels Paul Valéry, Paul Claudel, François Mauriac, Daniel-Rops, Albert Camus, Marcel Aymé, Jean Paulhan, Roland Dorgelès, Jean Cocteau, Colette, Arthur Honegger, Maurice de Vlaminck, Jean Anouilh, André Barsacq, Jean-Louis Barrault, Thierry Maulnier l’ont signée ?

Pourquoi les communistes tenaient-ils tellement à l’exécution de la sentence ?

A n’en pas douter, si le procès avait eu lieu un an plus tard, la peine de mort n’aurait pas été prononcée. La mort de Brasillach va peser sur le destin de tous les personnages qui ont été mêlés à son procès. Elle a continué à alimenter les débats intellectuels sur la responsabilité de l'écrivain.


Editeur : Gallimard (11 octobre 2001)
Collection : Hors série Connaissance
Langue : Français
ISBN-10: 2070759091
ISBN-13: 978-2070759095









Editeur : Editions du Rocher (5 janvier 2011)
Langue : Français
ISBN-10: 2268070298
ISBN-13: 978-2268070292