LOUIS VI LE GROS, roi de France (24.7.1108 au 1.8.1137 associé au trône en 1098)


Louis VI le Gros

de Eric Bournazel (Auteur)

«Dans la galerie de portraits du Moyen Âge en France, celui de Louis VI, au tournant des XIe et XIIe siècles (1108-1137), fait au premier abord piètre figure. Un gros roi, courageux mais pas très malin, des temps obscurs, un pouvoir déchu qui survit entre Paris et Orléans en livrant des luttes mesquines, des coups de mains contre des forts de madriers sur leur motte, des embuscades au coin des bois. C’est
pourtant ce roi-là qui pour longtemps fixa l’image à laquelle les uns tentèrent de ressembler et les autres de croire.
Car Louis, sixième du nom mais premier dans sa lignée capétienne, ce gros Louis qui mourut dans un lit, semi-impotent, n’était pas seulement un mangeur, c’était un aventurier. Et les aventures de sa jeunesse avaient été les combats par lesquels commença le lent enforcement du pouvoir royal en France, un
mouvement inverse de celui qu’allait connaître l’Angleterre. Dans la génération qui suivit sa mort, on mesurait le chemin parcouru, témoin un Anglais, accoutumé à la puissante royauté de son pays, qui disait du défunt : “ Dans sa jeunesse, il ne pouvait aller plus loin que la troisième lieue hors des portes de Paris sans permission ou escorte des grands d’alentour … ‘Le Seigneur le tira du sommeil’, il lui donna le désir de se battre et la grâce de gagner souvent, couronnant ses efforts par l’établissement de l’unité et de la paix à travers toute la France”. »

Éditeur ‏ : ‎ Fayard (21 novembre 2007)
Langue ‏ : ‎ Français
Broché ‏ : ‎ 527 pages
ISBN-10 ‏ : ‎ 2213634238
ISBN-13 ‏ : ‎ 978-2213634234
Poids de l'article ‏ : ‎ 700 g
Dimensions ‏ : ‎ 13.5 x 2.7 x 21.5 cm

LOUIS VI LE GROS (1081 env.-1137) roi de France (1108-1137)

Fils de Berthe de Hollande et de Philippe Ier, associé au trône en 1098 par son père qui lui avait confié les opérations militaires face aux Anglo-Normands, il doit se faire sacrer précipitamment le 3 août 1108 pour ne pas risquer la concurrence d'un fils de la seconde femme de son père, Bertrade de Montfort. Il épouse en 1115 Adélaïde de Savoie, nièce du pape Calixte II.

Sous son règne, le pouvoir royal s'affirme sur le domaine par l'élimination des seigneurs pillards d'Île-de-France : Ebbes de Roucy (1102), Enguerrand de Coucy (1117), et surtout Thomas de Marle (1130). Ce domaine est intelligemment mis en valeur suivant les conseils de Suger, abbé de Saint-Denis : création de villes neuves et privilèges fiscaux accordés aux communautés rurales contribuent à peupler l'Île-de-France. La charte de Lorris en Gâtinais servira de modèle pendant tout le XIIe siècle.

Au-delà du domaine, Louis VI essaie d'affirmer l'autorité de la justice royale dans les grands fiefs : il intervient avec succès en Bourbonnais et en Auvergne, mais il ne peut s'imposer ni en Normandie, ni en Flandre. Contre Henri Ier Beauclerc, duc de Normandie et roi d'Angleterre, il mène en vain trois campagnes pour soutenir les prétentions de Robert Courteheuse puis de Guillaume Cliton. En Flandre, il ne réussit pas davantage, après l'assassinat du comte Charles le Bon (1127), à imposer son protégé, le même Guillaume Cliton, contre Thierry d'Alsace. Ce second échec témoigne de l'existence de puissances nouvelles, les villes de Flandre, dont Louis VI n'avait pas respecté les privilèges.

Pourtant, comme dans son domaine, Louis VI saura jouer des forces socio-économiques nouvelles : il soutient l'établissement des communes urbaines en Picardie et en Flandre, comme il soutient les efforts des réformateurs grégoriens pour soustraire l'élection des évêques à l'autorité des princes, mais non à la sienne propre.

Cette politique porte ses fruits puisqu'en 1124, lorsque l'empereur Henri V, allié de Henri Ier Beauclerc son gendre, envahit la France, Louis VI obtient l'aide de tous ses grands vassaux, ce qui contraint l'empereur à se retirer sans combattre. Elle semble même remporter un succès sans précédent en 1137 : Louis VI marie son fils aîné, le futur Louis VII, à Aliénor, fille et unique héritière du duc d'Aquitaine. Le domaine royal s'étend de l'Oise aux Pyrénées, mais le divorce d'Aliénor et son remariage avec Henri II Plantagenêt (1152) devaient remettre en cause cette union contre nature du nord et du sud du royaume.

— Michel SOT : LOUIS VI LE GROS (1081 env.-1137) roi de France (1108-1137) - Encyclopædia Universalis