JEAN II LE BON, roi de France (22.8.1350 au 8.4.1364)

Jean le Bon

de Jean Deviosse (Auteur)

Le personnage de Jean II le Bon, roi de 1350 à 1364, est d'une ambiguïté extrême. Au vrai, sa nature apparaît comme un véritable défi à la logique.

Ainsi le souverain est laid, mais néanmoins séduisant. Jouisseur et insouciant, il se montre en même temps un excellent législateur. Il est naturellement bon, mais il sait aussi se montrer très cruel. Pacifiste, il guerroie. Il fait preuve d'une bravoure généreuse voire prodigue (à la bataille de Poitiers, où le Prince Noir le fait prisonnier, il se livre à une escrime sanglante, la hache d'armes au poing) et cependant il est capable de faire bombarder une ville avec des cadavres décapités sur son ordre. Candide et courtois, il n'en perd pas moins tout contrôle dans des fureurs aveugles. Il dévalue la monnaie plus que de raison en même temps qu'il lutte farouchement contre la vie chère.

Brave, " bien-disant ", il attire l'adoration du peuple, alors qu'il déchaîne le mépris chez la plupart des historiens modernes. Il a pour passion le luxe, la chasse et les tournois, mais, roi " humaniste ", il convie à sa Cour hommes de lettres et savants... Il rattache le Dauphiné et la Bourgogne à la couronne de France pour, plus tard, céder d'un coup un gros morceau du royaume aux Anglais...

Un destin pour le moins paradoxal qui le conduit à mourir en Angleterre, après avoir passé plus de la moitié de son règne en captivité. Et ces Anglais qui le pleurent et qui pendant la cérémonie funèbre font brûler autant de torches qu'ils en avaient allumées, au soir de Crécy, pour rechercher leurs morts...

Éditeur ‏ : ‎ Fayard (13 mars 1985)
Langue ‏ : ‎ Français
Broché ‏ : ‎ 555 pages
ISBN-10 ‏ : ‎ 2213015589
ISBN-13 ‏ : ‎ 978-2213015583
Poids de l'article ‏ : ‎ 558 g
Dimensions ‏ : ‎ 13.5 x 2.9 x 21.5 cm

JEAN II LE BON (1319-1364) roi de France (1350-1364)


Fils aîné de Philippe VI de Valois et de Jeanne de Bourgogne, Jean fut duc de Normandie, puis roi le 22 août 1350. Excellent chevalier, sa bravoure lui interdit la fuite qui avait sauvé son père à Crécy. D'intelligence probablement médiocre, il ne put éviter de graves maladresses qui lui aliénèrent le plus souvent le concours des états, maîtres de lui refuser les ressources financières pourtant indispensables au gouvernement. Hésitant entre la noblesse réformatrice, les bourgeois avides de promotion et les officiers au dévouement intéressé, il ne sut ni choisir ni jouer de leurs rivalités, et c'est à la faveur de sa captivité que la noblesse prit pour un temps le contrôle des rouages essentiels de l'État.

Il se brouilla avec les lignages les plus influents en faisant procéder à des exécutions sommaires, comme celle du connétable Raoul de Brienne (1350), envenima l'hostilité de son cousin le roi de Navarre, Charles le Mauvais, par d'inutiles spoliations, et humilia son propre fils, le futur Charles V, en faisant arrêter le Navarrais à Rouen alors qu'il y était l'hôte du jeune duc de Normandie.

Vaincu et pris par les Anglais à Poitiers le 19 septembre 1356, il fut libéré après la conclusion du traité de Brétigny-Calais (1360), qui coûtait la moitié du royaume et une rançon de trois millions de livres. En janvier 1364, le roi Jean retourna en Angleterre prendre la place de son fils Louis d'Anjou, qui avait abandonné son rôle d'otage. Pendant la première captivité du roi, la France fut en proie à la révolte parisienne d'Étienne Marcel et à la Jacquerie.

La ferme reprise en mains du gouvernement par le régent Charles, le discrédit des états généraux après leurs excès et le début du rétablissement militaire font des dernières années de ce règne le prélude à celui de Charles V. Mais, si Jean le Bon n'y a guère de part, il ne porte pas davantage seul la responsabilité des catastrophes accumulées pendant son règne et que les difficultés rencontrées par Philippe VI annonçaient depuis vingt ans. Souvent critiquée, la décision de donner en apanage à son fils Philippe le duché de Bourgogne, venu à la Couronne par héritage, comportait sur le moment plus d'avantages — adhésion des Bourguignons, obstacle à l'intrusion du Navarrais dans l'affaire — que d'inconvénients, puisque la rivalité des maisons de France et de Bourgogne était imprévisible. Sans doute exagérément accablé par la postérité critique, comme exagérément loué par l'imagerie populaire, Jean le Bon est encore un sujet de controverse entre les historiens.

— Jean FAVIER : JEAN II LE BON (1319-1364) roi de France (1350-1364) - Encyclopædia Universalis