31 juillet 1358: Etienne Marcel et la fin de la "révolution parisienne"

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Né à Paris en 1315, Etienne Marcel appartient à une famille de drapiers, dont la fortune est immense. Comme tous ceux de sa caste et sans doute encore plus qu'eux, il aspire au pouvoir politique dans le royaume. Orateur énergique, soldat valeureux et chef ambitieux, il tentera, en nouant des alliances successives et contradictoires, de contraindre la royauté à la réforme. Prévôt des marchands, c'est-à-dire magistrat suprême de la bourgeoisie qui gouvernait Paris, il exercera une sorte de dictature de salut public qui fera de lui, pour un temps, le véritable maître de la France. Sans doute l'objectif était-il trop ambitieux, les adversaires trop puissants, les alliés trop cyniques, les amis trop timorés.

Le roi de France Jean II le bon a été fait prisonnier à la bataille de Poitiers (1356). La défaite, suivie des préliminaires de Brétigny et du traité de Calais, ampute la France de la moitié de son territoire. On crie à la trahison. L’autorité royale est contestée. Des troubles éclatent. 

Le dauphin Charles et les Etats généraux, apprenant les conditions de ce honteux traité, en rejettent toutes les clauses. 

L'agitation continue. Les troubles se multiplient, singulièrement à Paris. Cette situation est paradoxale, car la ville s'est considérablement enrichie durant les dernières décennies.

C'est alors que, escomptant accélérer son accession au pouvoir, Etienne Marcel se compromet avec les Anglais, bien décidé à renverser avec l'aide de notre ennemi le pouvoir royal vacillant. Le dauphin Charles exploite cette situation, se posant en défenseur du royaume. Il quitte Paris, et réunit en province les Etats qui le soutiennent. Le futur Charles V est bien décidé à reconquérir le terrain perdu. Sentant l'hostilité croissante de la noblesse et de la province, Etienne Marcel change de politique. Il comprend que la France ne le suivra pas dans une révolution. Il décide donc de soulever Paris. Pour y parvenir, il favorise l'évasion de Charles de Navarre, ennemi juré du dauphin, et allié aux Anglais. Charles de Navarre vient s'établir à Paris, où il prononce un fameux discours démagogique au Pré aux clercs.

Entre les deux Charles qui s'affrontent, Etienne Marcel joue les conciliateurs. Puis il tient lui-même des réunions et distribue à ses partisans des chaperons rouge et bleu
(couleurs de la Ville de Paris), comme signe de reconnaissance. Bientôt, de sanglantes émeutes éclatent à son instigation. Constatant la résistance du dauphin, il décide d'en finir d'une manière radicale, en faisant assassiner sous ses yeux deux de ses conseillers, les maréchaux de Champagne et de Normandie et qu'il coiffe de son chaperon aux couleurs de la ville "en signe de protection".

Nous sommes le 22 février 1358. Marcel épargne l'héritier du trône de France car il le sous-estime et pense pouvoir le contrôler aisément : c'est une lourde erreur. Il est de plus en plus l'esclave de la révolution qu'il a enclenchée, et de la compromission avec Charles de Navarre, dont l'alliance lui est indispensable pour parvenir à ses fins.

Les événements se précipitent. Le dauphin, qu'il a fait proclamer régent le 14 mars, s'enfuit et convoque les Etats de langue d'oïl à Compiègne. Il obtint leur soutien, en échange de la promesse de réformes, qu'il mènera à bien tout au long de son règne.

Les Parisiens sont isolés. Les Jacques (qui donneront par extension le terme "jacqueries" pour nommer toutes les révoltes paysannes), appelés à la rescousse par Etienne Marcel, sont massacrés par son allié le Navarrais. Il demande alors l'aide des communes flamandes, traditionnelles ennemies de la France et alliées de l'Angleterre.  Celles-ci, effrayées par la gangrène parisienne, refusent. Furieux de la dictature d'Etienne Marcel et de Charles de Navarre, les bourgeois de Paris se révoltent contre ceux qui prétendaient défendre leurs intérêts.

Le blocus effectué par le dauphin autour de Paris exaspère bientôt toute la population.

Après avoir nommé Charles le Mauvais (surnom donné à Charles de Navarre) capitaine général de Paris le 15 juin 1358, le prévôt est obligé d'expulser de Paris les Anglo-
Navarrais. Il est assassiné, dans la nuit du 31 juillet au 1er août 1358, par des membres de sa propre famille, qui assouvissaient des rancunes personnelles et débarrassaient la bourgeoisie parisienne d'un homme considéré comme trop extrémiste. Le projet d'une monarchie " contractuelle " et de la sauvegarde de l'unité française fut remis à plus tard…

La " révolution parisienne ", animée par Etienne Marcel au milieu du XIVe siècle, apparaît bien, après plus de 600 ans, comme l'acte de naissance politique d'une capitale.