9 janvier 1431: le procès de Jeanne d'Arc

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Les archives nous livrent aujourd’hui une copie du procès, le « manuscrit d’Urfé » et trois copies des procès verbaux.

Instruction du procès

Le procès de Jeanne d’Arc s’ouvre le 9 janvier 1431 devant une assemblée de religieux et de théologiens. Dans un premier temps, ceux-ci s’interrogent avec une grande prudence sur la conduite à suivre. Les enquêtes sont présentées, on prévoit d’en faire d’autres.
Outre Pierre Cauchon qui préside le procès, on trouve Maître Jean d’Estinet nommé procureur général, Jean de la Fontaine, conseiller commissaire instructeur. On trouve aussi des greffiers comme Bois Guillaume et Manchon. Maître Jean Massieu est l’exécuteur des exploits et des convocations.

Au total, environ cent vingt personnes vont participer à ce procès.

Le 19 février 1431, le ministère de l’inquisition est invoqué. Le grand inquisiteur est en déplacement, c’est son vicaire et vice-inquisiteur, Frère Jean Lemaître qui le remplace. 
Suite à la lecture des articles et des dépositions des témoins, les conseillers décident qu’il y a « matière suffisante pour faire livrer la prévenue en cause de foi ».

Procès préparatoire - Interrogatoire

Le 21 février, la séance est ouverte dans la chapelle royale du château de Rouen où Jeanne est citée à comparaître. Sa prestation de serment pose problème à ses juges.
Jeanne affirme que les révélations qui lui viennent de ses visions ne sont réservées qu’à son roi et qu’elle ne pourra donc répondre aux questions qui les concernent : « …Mais quant aux révélations qui me viennent de Dieu, je n’en ai onques rien dit ni révélé à personne, sinon à Charles mon roi… »
Jeanne maintiendra jusqu’au bout cette restriction sur sa prestation de serment.
Pendant plusieurs semaines, elle est interrogée sur sa vie avant et après son départ de son village natal de Domrémy. Paysanne sans éducation ni savoirs, Jeanne fait face comme elle le peut à ses juges, sans se recouper, avec assurance, voire audace.
Surtout, Jeanne ne veut ni renoncer à ses vêtements d’homme, ni réfuter ses visions.
Ces « étrangetés » vont servir à asseoir l’accusation d’hérésie et de sorcellerie constamment dans l’esprit des théologiens comme on le constate dans leurs questions :
12e séance, jeudi 1er mars 1431 :
I « Que dites-vous touchant notre seigneur le pape et qui croyez-vous vrai pape ? »
J « Il y en a donc deux ? »(…)
I « Qu’avez-vous fait de votre mandragore ? »
J « Je n’ai ni oncques n’eus de mandragore… »






Procès ordinaire

Réquisitoire - Actes d’accusation

Le 27 mars, le procès ordinaire commence par le réquisitoire de Jean d’Estivet qui remet l’acte d’accusation au tribunal. La requête est mise en délibération. Jeanne est présente, elle refuse le conseil que lui propose l’évêque Cauchon pour se défendre.

Enfin, les 27 et 28 mars, les actes d’accusation sont lus par Maître Thomas de Courcelles qui requiert que « ladite Jeanne soit déclarée et prononcée sorcière et sortilège, devineresse (…) hérétique (…) schismatique (…) elle soit punie et corrigée ».

D’innocentes fêtes de Domrémy deviennent des incantations maléfiques.

L’habitude de Jeanne de porter un « habit d’homme », « abandonnant sans vergogne toute décence », est dénoncée avec conviction par ses juges…

Les réponses de Jeanne d’Arc ont été déformées pour construire l’accusation.

Attentive à la lecture des actes, Jeanne nie et renvoie à chaque fois à ses réponses originales.

Rédaction des articles - Délibération

Douze articles servent de base à la condamnation. Ils ne seront pas transmis à l’accusée ; des ajouts et des manquements seront détectés lors du procès en réhabilitation, quelques années plus tard, en comparant les articles du procès avec les pièces conservées par un greffier.

Dans la délibération du 12 avril (44e séance), basée sur ces articles, les visions de Jeanne sont décrites comme « des fictions d’invention humaine en procédant du malin esprit ». Jeanne est également présentée comme une hérétique et une schismatique, accusée de blasphèmes et de « divinations superstitieuses ». En conclusion, « (…) la prévenue doit être abandonnée au bras séculier  pour expier son crime (…)».

Condamnation de l’Université de Paris

Le 19 avril, Jean Beaupère, Jacques de Touraine, Nicolas Midi quittent Rouen pour Paris afin de soumettre les 12 articles à l’Université de Paris.

La réponse de l’Université revient à Rouen un mois plus tard, elle est lue le 19 mai dans la chapelle du Palais épiscopal. Les conclusions rejoignent celles énoncées précédemment en matière de sorcellerie et d’hérésie.

Jeanne est assignée le lendemain pour la lecture de sa sentence.

Renonciation de saint Ouen

Cette abjuration, destinée à lui faire renier ses visions, se tient le lendemain au cimetière de Saint Ouen, en plein air. Mais c'est en réalité une simple soumission. Jeanne a probablement simplement accepté de reconnaître l’autorité de l’Eglise et de reprendre les vêtements féminins en échange de sa vie.

En effet, des éléments troublants survenus durant cette journée sont venus jusqu’à nous grâce à des témoignages : des désordres sont relatés après la signature de Jeanne, l’évêque Cauchon est pris à partie et accusé de complaisance par les religieux anglais, la foule crie à la tromperie…

De plus, la soi-disant pièce d'abjuration rapportée au procès n’est pas la pièce que Maître Guillaume Erard fit signer à Jeanne en public.

Grâce à cette mascarade, Jeanne échappe toutefois au bourreau qui était prêt à l’emmener ; elle est reconduite à la prison anglaise.

Condamnation

Le répit est de courte de durée. De retour dans sa prison anglaise, Jeanne s’habille de nouveau en homme. Là aussi, les circonstances de ce revirement sont suspectes. On sait aujourd’hui que les anglais ont infligé sévices et violences à Jeanne et lui ont ôté et subtilisé ses vêtements féminins. Greffiers et clercs appelés pour constater le revirement vestimentaire sont empêchés de pénétrer dans la prison ; ils sont molestés et menacés par les anglais.

Pour s’être ainsi de nouveau vêtue, Jeanne est déclarée relapse (retombant dans ses erreurs passées). Le 28 mai, un second jugement lui sera fatal. Interrogée sur ses visions, Jeanne campe sur ses positions habituelles et ne reconnaît pas son abjuration du 24 mai :

« Dit qu’elle n’a point dit ou entend révoquer ses apparicions… »

« …et que ce qui estoit en la cédule de l’abjuracion, elle ne l’entendait point »

Jeanne meurt sur le bûcher le 30 mai 1431.

Le Frère Ladvenu qui l’accompagna jusqu’au supplice se souvint que « jusqu’à sa dernière heure, comme toujours, Jeanne affirma et maintint que ses voix étaient de Dieu… ».

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