25 juillet 1593: "Paris vaut bien une messe"
Le Vert Galant n'a sans doute
jamais prononcé cette fameuse boutade. Elle n'apparaît qu'en 1622, soit douze
ans après son assassinat par Ravaillac, dans un recueil facétieux, Les Caquets
de l'accouchée, où le vieux duc de Lesdiguières attribue le mot... à Sully. Un
jour qu'Henri IV demandait à celui-ci pourquoi il n'allait pas à la messe aussi
bien que lui, le huguenot aurait rétorqué : « Sire, sire, la couronne vaut bien
une messe ! » Le mémorialiste Pierre de L'Estoile évoque une anecdote similaire
dans ses Mémoires journaux. Le 25 juillet 1593, c’est le sixième et dernier
changement de religion du roi de France mais «Paris vaut bien une messe».
Baptisé en 1553 dans la
religion catholique, il suit sa mère Jeanne d'Albret dans sa conversion à la
Réforme durant les années 1560. Il est contraint d'abjurer peu après son
mariage, pour échapper aux massacres de la Saint Barthélemy en août 1572.
Échappé de la cour de France en février 1576, il renoue avec le protestantisme:
dans le langage des théologiens, c'est un « relaps». Pressé par un
entourage de catholiques ralliés, dans un contexte de guerres destinées à faire
reconnaître son autorité (après son avènement en 1589), il finit par se
convertir le 25 juillet 1593 devant les murs de Paris assiégée, très
solennellement dans le sanctuaire royal de Saint-Denis entre les mains de
Renaud de Beaune, l'archevêque de Bourges. Le roi s'agenouille et jure
de mourir dans la religion catholique. L'archevêque lui donne l'absolution et
le roi baise son anneau. Henri IV accompli ce qu'il appela lui-même un
« saut périlleux ».
Il est sacré à Chartres le 27
février 1594 (et non à Reims, encore aux mains des Ligueurs). Le serment qu'il prononce
alors l'engage désormais à défendre la foi catholique. Les miracles de la
guérison des écrouelles qu'il accomplit, tels ses prédécesseurs, dès la sortie
de la messe achèvent de prouver aux yeux de l'opinion catholique sa sincérité,
plus que l'absolution pontificale qu'il obtient le 17 septembre 1595. Le
22 mars 1594, Paris ouvre ses portes au nouveau Roi Très Chrétien après avoir
chassé les Ligueurs.
Par l'édit de Saint-Germain
du 15 novembre 1594, le roi renouvelle les garanties des précédents édits de
pacification. Dans le même temps, Henri IV s'engage à faire appliquer en France
des décisions du concile de Trente et au rétablissement de la religion
catholique dans le royaume de Navarre.
C’est à Nantes, le 13
avril 1598, qu’est signé après d’amples négociations, l’édit qui va permettre
de rétablir la paix religieuse dans le Royaume.
Le roi impose l’enregistrement de l’édit aux
Parlements qui sont réticents. C’est ainsi qu’il s’adresse au Parlement de
Paris : « …Je vous prie d’enregistrer l’édit que j’ai accordé à ceux de la
religion…je suis roi maintenant et parle en roi et veux être obéi…Faites
seulement ce que je vous commande ou plutôt ce dont je vous prie. Vous ne le
ferez pas seulement pour moi, mais aussi pour vous et pour le bien de la
paix…Il ne faut pas faire de distinction de catholique et de huguenot, mais il
faut que tous soient bons Français…Je suis roi et berger qui ne veux répandre
le sang de mes brebis, mais les veux rassembler avec douceur et non par force…
»
Après la signature de la paix
de Vervins, le 2 mai de la même année, les Espagnols quittent le pays.
Les « aller et
retours » religieux, le ballotement entre les deux confessions, vécus par
Henri IV n'ont pourtant rien d'exceptionnels à cette époque. Les chrétiens
«entre deux chaires » (pour reprendre l'expression de l'historien Thierry
Wanegffelen) ont été relativement nombreux, soit à cause des événements, soit à
cause des hésitations dans le cadre d'un quête spirituelle personnelle
exigeante.
Voir la fiche de HENRI IV