20 juillet 1524 : la reine Claude, un ventre pour la France
Le sort des femmes du peuple
au début du XVIème n’est pas enviable, mais celui des femmes de la haute
aristocratie ne l’est guère plus. La vie de Claude en est une des multiples
illustrations.
Claude voit le jour le 13
octobre 1499 à Romorantin. Elle n’est autre que la fille du roi de France Louis
XII. Sa simple naissance en fait l’objet essentiel de la politique matrimoniale
de son père. C’est le lot de toute fille de roi. Mais elle n’est pas que la « fille
de son père », elle est aussi la riche héritière de sa mère, Anne de Bretagne.
Elle est l’héritière présomptive du duché de Bretagne, des comtés de Soisson,
de Blois, de Coucy, d’Etampes et de Montfort, ainsi que des droits sur le duché
de Milan.
Alors qu’elle n’a que deux
ans, un contrat de mariage est signé avec les représentants du duc Charles de Luxembourg
(futur Charles Quint), petit-fils de l’empereur Maximilien, archiduc d’Autriche
et Empereur des Romains (un temps marié par procuration à Anne de Bretagne,
avant que Charles VIII n’annule le contrat… et l’épouse – veuve elle se marie
avec le successeur de son défunt époux, le roi Louis XII). Ce sont sa
propre mère, Anne de Bretagne, et le cardinal d'Amboise, qui
promeuvent cette solution. Anne espère ainsi ménager la survie de ses États
et éviter que la Bretagne ne tombe entre les mains du jeune comte d’Angoulême
(le futur François 1er) qu'elle déteste. Louis XII s'y résout parce
qu'il a besoin de l'alliance impériale dans la guerre qu'il mène en Italie et
notamment pour recevoir l'investiture du duché de Milan. Ces fiançailles
auraient fait passer la Bretagne à la mort d'Anne dans les mains du
prince Charles, déjà appelé à hériter des Espagnes, de l'Autriche
et des états bourguignons. En outre, les traités de Blois donnaient à Claude
une dot somptueuse en cas de défaut d'héritier mâle pour Louis XII : la
Bretagne, déjà mentionnée, mais aussi les duchés de Milan et de
Bourgogne, les comtés de Blois et d'Asti ainsi que le territoire
de la république de Gênes. Mais en 1505, Louis XII, très malade,
craignant pour sa vie et ne souhaitant pas obérer le règne de son seul
héritier, fait annuler ces fiançailles par les États généraux de Tours,
au profit du jeune duc de Valois.
Simple
pion sur l’échiquier des relations internationales, Claude épouse donc son
cousin, François d’Angoulême, le 18 mai 1514. Elle a 15 ans. Sa mère est morte
au début de l’année et François fait ainsi main-basse sur la Bretagne. Son père
meurt quelques mois plus tard. Au contraire de sa sœur cadette Renée,
qui était la véritable héritière du duché de Bretagne selon le contrat de
mariage d'Anne et de Louis XII, elle semble ne s'être jamais intéressée à son
héritage maternel et n'avoir montré aucune disposition à la politique, tandis
qu'elle préférait se dévouer à la religion.
Réduite dès son mariage au
rôle primitif de la reine (assurer une descendance), Claude reste éloignée de
la Cour. Continuellement rudoyée par sa belle-mère, Louise de Savoie, elle subit
l’humiliation de son mari qui lui impose ses multiples maitresses. Décrite par les ambassadeurs étrangers
comme plutôt laide avec un strabisme à l’œil gauche, de très petite taille, claudiquant,
ses
maternités successives la font paraître continuellement bien en chair aux dires
de la Cour, qui en fait un sujet de moquerie.
En huit ans, entre 1515 et
1523, elle met au monde sept enfants. Elle a 15 ans et demi lorsqu’elle donne
le jour à une petite Louise, qui meurt trois ans plus tard ; puis
Charlotte en 1516 (elle meurt alors qu’elle n’a pas huit ans) ; François,
en 1518, dauphin et duc de Bretagne, il ne survit pas à son père ; c’est
son frère, Henri, né en 1519, qui lui succède comme duc de Bretagne et
deviendra roi de France sous le nom de Henri II. Viennent ensuite Madeleine en
1520, morte à 17 ans, reine d’Ecosse ; Charles, né en 1522, duc d’Orléans
et mort en 1545 ; enfin Marguerite, en 1523, duchesse de Savoie, elle
décédera à 51 ans.
Ainsi, entre sa première grosse et son dernier
accouchement, elle aura été enceinte 63 mois sur 103 mois. François 1er
ne lui aura donné que la vérole (Brantôme témoignera « que le roy
son mary luy donna la vérolle, qui lui advança ses jours »). Epuisée par ses grossesses, elle meurt
seule au château de Blois où elle s’était retirée, le 20 juillet 1524. Elle n’a
pas 25 ans. Bien
qu’il se soit dit contrarié de cette mort, François 1er n’assistera
pas aux obsèques de son épouse.
L’Histoire gardera d’elle l’image d’une reine «
bonne et très charitable, fort douce à tout le monde qui ne fit déplaisir ni
mal à aucun de sa cour ni de son royaume ».
Voir la fiche de FRANCOIS 1er
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