13 (ou 2) Février 1754 : Naissance du "Diable boiteux"

" Je veux que pendant des siècles, on continue à discuter sur ce que j'ai été, ce que j'ai pensé, ce que j'ai voulu. " À lire les injures, les jugements à l'emporte-pièce et les contresens qu'ont commis sur lui presque tous les historiens, le Diable boiteux a été entendu au-delà de ses espérances ! Il faut dire qu'il a lui-même brouillé les pistes à plaisir, qu'il est resté au pouvoir pendant plus d'un demi-siècle, u il a servi neuf régimes et prêté treize serments. Il faut ajouter que, né et formé sous le règne de Louis XV, et mort l'année de l'avènement de Victoria, ce corrompu, cet homme qui savait faire marcher les femmes, ce joueur invétéré n'est ni un traître par profession ni même un intrigant de haute volée, comme le voudraient la plupart de ses biographes. On ne peut pas non plus soutenir sérieusement qu'il ait voulu à toute force servir la France, donner chair à des idées, poursuivre un idéal. Doit-on alors saluer l'artiste et se résoudre à n'avoir jamais le fin mot ? Rien de tel. Son ironie distante, sa subtilité et sa science de l'époque n'auraient pas suffi à Emmanuel de Waresquiel s'il n'avait aussi dépouillé, en France et à l'étranger, d'innombrables cartons d'archives qui lui ont livré des centaines d'informations inédites et d'éclairages nouveaux sur des points obscurs ou controversés. Avec ses intuitions et son sens de la formule, par touches successives, il dresse du personnage le plus complexe et le plus ambigu de notre histoire un portrait profondément humain, entièrement nouveau, cohérent et intelligible. Il fait revivre une figure d'une intelligence et d'une énergie exceptionnelles qui s'est montrée à la hauteur des secousses terribles auxquelles l'Europe a été soumise il y a deux siècles ; un grand seigneur de l'ancien temps fidèle à ses origines, qui a littéralement créé le rôle de l'homme de pouvoir moderne ; un visionnaire et un formidable metteur en scène de sa vie qui s'est forgé son propre destin en pesant sur les événements, tout en gardant la maîtrise de lui-même jusque sur son lit de mort. À cette biographie définitive est joint un cahier contenant de nombreux documents iconographiques le plus souvent inédits.



Aristocrate, il est nommé évêque d’Autun par Louis XVI, en 1788, il a 34 ans.

Elu député du clergé d’Autun lors de la convocation des états généraux, il rallie le tiers état le 26 juin 1789. Il suggère alors à l’Assemblée de nationaliser les biens de l’Eglise. Membre du camp majoritaire des royalistes constitutionnels (comme son ami, Mirabeau) de l’Assemblée nationale constituant (1789-1791), il en devient le président en 1790. Lors de la Fête de la Fédération (14 juillet 1790), il célèbre la messe en tant qu’évêque d’Autun.

Les évènements alors se précipitent. En janvier 1791, il démission de sa charge d’évêque. Le 10 août 1792, la monarchie est renversée. Talleyrand, qui fait alors l’objet d’un décret d’accusation, fuit en Angleterre puis aux Etats-Unis.

On le retrouve cinq ans plus tard ministre des relations extérieures (juillet 1797). Il se montre soucieux de l’équilibre européen et hostile aux conquêtes. Il entretient une correspondance avec un jeune général de 26 ans, Bonaparte. En décembre 1797, Talleyrand lance l’idée d’une campagne d’Egypte, flattant le général Bonaparte qui rêve d’Orient. Ainsi, l’habile diplomate évite un affrontement direct avec l’Angleterre et offre au Directoire un peu de répit face à la popularité grandissante du général.

De retour de la campagne d’Egypte, Bonaparte veut conquérir le pouvoir. Talleyrand lui apporte une aide précieuse lors du coup d’état du 18 brumaire (9 novembre 1799). Il devient à nouveau ministre des relations extérieures du premier Consul Bonaparte.
Nouvelle étape, l’Empire. Grand chambellan du Consul à vie Bonaparte, Talleyrand assiste au sacre de l’Empereur. Prince de Bénévent en 1806 mais déçu que l’Empereur n’écoute pas ses conseils de modération, il se rapproche du tsar Alexandre 1er. Il démissionne de ses fonctions de ministre des relations extérieures le 10 août 1807. Le 14 il est nommé vice-grand-électeur de l’Empire et reste le conseiller de Napoléon 1er
Fin 1808, la rupture est consommée. Talleyrand, qui a cherché à conspirer contre l’Empereur, se voit retirer le poste de Grand Chambellan. Finalement, il n’est pas plus inquiété que ça. L’empereur visiblement ne peut se passer de ses conseils. La faillite de la banque Simons oblige Talleyrand a demander un prêt au tsar. La encore, en 1811, c’est Napoléon qui met fin à ses difficultés financières en lui offrant l’Hôtel Matignon (résidence actuelle de nos premiers ministres).
En décembre 1812, l’Empereur propose à notre personnage de reprendre les relations extérieures. Mais celui-ci a senti le vent tourner et intrigue de plus bel. Sa correspondance avec Louis XVIII, toujours en exil, est interceptée par la police impériale. Rien. Pis même, en décembre 1813, l’Empereur accepte, sur proposition du « diable boiteux », le retour des Bourbons sur le trône d’Espagne. Refusant une nouvelle fois le poste de ministre des relations extérieures, en janvier 1814, l’Empereur le nomme au conseil de régence.
Alors que le roi de Prusse et le tsar entrent dans Paris avec leurs armées, Talleyrand plaide le retour des Bourbons, reniant et la République et l’Empire.
Le 1er avril 1814, le Sénat le nomme président du gouvernement provisoire et déchoit l’empereur. N’ayant le soutien ni des royalistes, ni des bonapartistes, Talleyrand rejoint Louis XVIII. Le 13 mai, il est fait…. Ministre des affaires étrangères du Roi. Dans l’année il devient prince de Talleyrand et pair de France. Après les 100 jours, et alors qu’il est en difficulté avec Louis XVIII, le prince de Talleyrand conserve son poste et se voit nommer président du Conseil des ministres (9 juillet 1815). Il n’arrivera pas à se maintenir au pouvoir.
Le 28 septembre 1815, il est nommé grand chambellan de France. Sa « disgrâce » durera jusqu’en 1830 (Louis XVIII puis son frère Charles X).
S’étant rapproché de la famille d’Orléans, Talleyrand lance, grâce au journaliste Adolph Thiers et à son journal Le National, une contestation des « Ordonnances de Juillet » qui provoque la chute de Charles X (les Trois Glorieuses).
Talleyrand reçoit alors Louis-Philippe d’Orléans et prend son parti. Devenu roi des français, Louis-Philippe 1er nomme Talleyrand ministre des affaires étrangères et ambassadeur extraordinaire à Londres (août 1830). Il quittera la scène quatre années plus tard après avoir signé le traité de la Quadruple-Alliance (Royaume-Uni, France, Portugal, Espagne).
Retiré dans son château de Valençay, il meurt le 17 mai 1838, à 84 ans.