28 mai 1871: Paris... couleur rouge sang !



La Commune de Paris, c’est l’histoire d’une tragédie dont l'acteur principal est le petit peuple de Paris, poussé à l'insurrection par la misère et par les souffrances du siège, par l'ardeur d'un patriotisme déçu et par la vigueur de traditions révolutionnaires presque séculaires, par la politique intransigeante d'une Assemblée anti-républicaine et par le rêve (fou ?) d'un monde meilleur. Malgré la confusion de leurs idées, la faiblesse de leur sens politique, la violence de leur langage ou de certains de leurs actes, les communards ne peuvent que nous émouvoir par leur désespoir et par la sincérité de leurs cris. Comment rester insensible aux appels et aux revendications de ces hommes, de ces femmes, et de ces enfants, qui réclamaient avec tant de véhémence et de maladresse l'avènement de la République démocratique et sociale ? Leur vocabulaire et leurs références passéistes peuvent irriter les doctrinaires, les amateurs de systèmes et les contre-révolutionnaires. Mais leur programme ne semble guère démodé aux républicains de toutes nuances.
Car que demandent-ils au fond ? La République et la victoire sur l'envahisseur, du pain et un toit pour tous, la justice et la solidarité sociales, la reconnaissance de leurs droits et de leur dignité, et, couronnant le tout, la liberté.



La Commune de Paris, c’est l’histoire d’une tragédie dont l'acteur principal est le petit peuple de Paris, poussé à l'insurrection par la misère et par les souffrances du siège, par l'ardeur d'un patriotisme déçu et par la vigueur de traditions révolutionnaires presque séculaires, par la politique intransigeante d'une Assemblée anti-républicaine et par le rêve (fou ?) d'un monde meilleur. Malgré la confusion de leurs idées, la faiblesse de leur sens politique, la violence de leur langage ou de certains de leurs actes, les communards ne peuvent que nous émouvoir par leur désespoir et par la sincérité de leurs cris. Comment rester insensible aux appels et aux revendications de ces hommes, de ces femmes, et de ces enfants, qui réclamaient avec tant de véhémence et de maladresse l'avènement de la République démocratique et sociale ? Leur vocabulaire et leurs références passéistes peuvent irriter les doctrinaires, les amateurs de systèmes et les contre-révolutionnaires. Mais leur programme ne semble guère démodé aux républicains de toutes nuances.
Car que demandent-ils au fond ? La République et la victoire sur l'envahisseur, du pain et un toit pour tous, la justice et la solidarité sociales, la reconnaissance de leurs droits et de leur dignité, et, couronnant le tout, la liberté.

En juillet 1870, Napoléon III entreprend contre la Prusse une guerre mal préparée, qui le conduit rapidement à la défaite. Le 4 septembre 1870, à la suite d'une journée d'émeutes parisiennes, l'Empire est renversé. Un gouvernement de défense nationale s'installe à l'hôtel de ville de Paris officiellement pour poursuivre la guerre contre les États allemands, dont les troupes occupent le nord du pays. Paris est assiégée et connaît une grave famine au cours de l'hiver 1870-1871. Les Français, humiliés, apprennent que l'Empire allemand a été proclamé dans la galerie des Glaces du château de Versailles le 18 janvier 1871.

Les élections législatives du 8 février, organisées dans la précipitation pour ratifier au plus vite l'armistice, envoient une forte proportion de monarchistes (400 députés), candidats des listes « pour la paix », à l'Assemblée nationale. La plus grande partie des élus représentant Paris sont eux des républicains des listes « pour la guerre », souvent extrémistes. Comme en juillet 1830, comme en février/avril 1848, suivies des élections d'avril 1848, les classes aisées confisquent le pouvoir politique à leur profit en installant la Monarchie de Juillet et la Deuxième république, qui débouchera sur le Second Empire. Les Parisiens sont méfiants envers l'assemblée élue en février 1871. De plus, le peuple parisien estimant s'être correctement défendu ne se considère pas comme vaincu et souhaitait poursuivre la lutte contre les Allemands.

Les nominations par le gouvernement de trois bonapartistes aux postes de préfet de police (Louis Ernest Valentin), de chef de la Garde nationale (le général Louis d'Aurelle de Paladines) et de gouverneur (le général Joseph Vinoy), sont vécues comme une provocation par les Parisiens. Le 10 mars 1871, l'Assemblée, royaliste et pacifiste, transfère son siège de Paris à Versailles contribuant à l'exacerbation des tensions.

Dans la Capitale, les ouvriers sont très nombreux : 442 000 sur 1,8 million d'habitants, selon le recensement de 1866, ainsi que les artisans (près de 70 000, la plupart travaillant seuls ou avec un unique ouvrier) et les très petits commerçants dont la situation sociale est assez proche de celle des ouvriers. Depuis septembre 1864, il existe une Internationale ouvrière qui a des représentants à Paris.

Le 17 mars 1871, Adolphe Thiers et son gouvernement, envoient au cours de la nuit la troupe sous le commandement du général Lecomte soustraire les 227 canons entreposés à Belleville et à Montmartre que les Parisiens considèrent comme leur propriété, ceux-ci les ayant payés par souscription lors de la guerre contre la Prusse. Ils disposent également de près de 500 000 fusils. À Montmartre, au matin du 18 mars 1871, le peuple parisien s'éveille et s'oppose à la troupe. Puis, rapidement, celle-ci fraternise avec lui. Les généraux, Lecomte et Clément-Thomas sont massacrés par la foule rue des Rosiers, malgré la demande de protection du maire du 18e arrondissement, Georges Clemenceau. C'est le début de l'insurrection. Thiers gagne Versailles. Des Parisiens, habitant surtout des quartiers aisés de l'Ouest parisien ou fonctionnaires, l'y suivent (environ la moitié de la population de la ville).

Les élections, organisées le 26 mars pour désigner les 92 membres du Conseil de la Commune affiche un taux d'abstention est de 52 %. L'élection d'une vingtaine de candidats « modérés », représentant les classes aisées, montre que le scrutin ne fut au moins pas totalement biaisé. Toutes les tendances politiques républicaines et socialistes sont représentées, jusqu'aux « anarchistes » : es « jacobins », admirateurs de la Révolution de 1789 et plutôt centralisateurs ;  des « radicaux », partisans de l'autonomie municipale et d'une république démocratique et sociale ;  des « blanquistes », adeptes de l'insurrection et avant-gardistes ; des collectivistes, membres de l'Association internationale des travailleurs ; quelques « proudhoniens », partisans de réformes sociales ; des « indépendants » et des francs-maçons. Rapidement, le Conseil de la Commune se divise en « majorité » (jacobins, blanquistes et indépendants se voulant les continuateurs de l'action des « montagnards » de 1793) et « minorité » (radicaux et « internationalistes », collectivistes ou proudhoniens, partisans de la République sociale). Ces tendances se cristallisent le 28 avril à propos de la création d'un Comité de Salut public, organisme que les minoritaires refusent comme contraire à l'aspiration démocratique et autonomiste de la Commune. La population se retrouve dans de nombreux lieux pour y discuter de la situation, proposer des solutions, voire faire pression sur les élus ou aider l'administration communale. Réunis dans les lieux les plus divers, ils permettent à des orateurs réguliers ou occasionnels de faire entendre les aspirations de la population et de débattre de la mise sur pied d'un nouvel ordre social favorable aux classes populaires (comme au Club de la Révolution, animé par Louise Michel).

Dès le 29 mars, le Conseil de la Commune forme en son sein dix commissions : exécutive, militaire, subsistances, finances, justice, sûreté générale, travail, industrie et échanges, services publics et enseignement. La Commune administre Paris jusqu'au 20 mai. De nombreuses mesures sont prises et appliquées pendant les 72 journées d'une intense activité législatrice. La Commune n’ayant aucune légitimité au regard du gouvernement légal du pays, ces mesures disparaissent avec elle sans qu’il soit nécessaire de les abolir explicitement ensuite. Certaines seront reprises par la République plusieurs décennies plus tard.

Dans son programme daté du 19 avril 1871, la Commune résume :

« La Révolution communale, commencée par l'initiative populaire du 18 mars, inaugure une ère nouvelle de politique expérimentale, positive, scientifique. C'est la fin du vieux monde gouvernemental et clérical, du militarisme, du fonctionnarisme, de l'exploitation, de l'agiotage, des monopoles, des privilèges, auxquels le prolétariat doit son servage, la Patrie ses malheurs et ses désastres. »

Mais une grande partie de l'action de la Commune fut absorbée dans la lutte contre l'offensive menée par les troupes régulières obéissant au gouvernement du pays dirigé par Thiers et dénommées les « Versaillais » par les insurgés. Face à une armée nombreuse, expérimentée et bien armée, la Commune dispose des hommes de la Garde nationale. 

Les troupes régulières passent à l'attaque les premiers. Le 21 mars, ils occupent le fort du Mont-Valérien où les fédérés de la Commune ont négligé de s'installer. Le 2 avril, ils s'emparent de Courbevoie et de Puteaux, les fédérés se repliant vers Neuilly. Le 3 avril, la Commune lance une contre-offensive en direction de Versailles qui se solde par un échec. Le 5 avril, la Commune décrète la mobilisation comme volontaires des jeunes gens de 17 à 19 ans et en service obligatoire des célibataires et hommes mariés de 19 à 40 ans. Ces soldats n'ont pratiquement pas d'expérience militaire et s'ils sont animés d'ardeur républicaine, sont aussi assez réticents à la discipline.

Pendant trois semaines environ, les combats sont sporadiques, mais les bombardements intensifs. Cette période permet à l'armée versaillaise de se renforcer. Au soir du 26 avril, le village des Moulineaux est occupé par les « Versaillais » qui, le 29, menacent le fort d'Issy où des ordres contradictoires ont entraîné un début d'évacuation. Le 5 mai, ils s'emparent du village de Clamart. Le 8, l'enceinte fortifiée de Paris est violemment bombardée de Grenelle à Passy, tandis que le 9, le fort d'Issy est pris par les forces gouvernementales. Thiers adresse une proclamation aux Parisiens où il demande leur aide pour mettre fin à l’insurrection et les informe que l’armée régulière va devoir passer à l’action dans la ville elle-même. Le 13, les « Versaillais » occupent le fort de Vanves, mais sont arrêtés par l'artillerie de la Commune. Le 17, la cartoucherie de l'avenue Rapp explose dans des circonstances peu claires. 

La Semaine sanglante débute avec l'entrée des troupes versaillaises dans Paris le 21 mai.

Dimanche 21 mai : Les Versaillais occupent Auteuil et Passy. Ils fouillent systématiquement les maisons, procèdent sur dénonciation à des arrestations et commencent à fusiller les Gardes nationaux du secteur conduits au cimetière de Longchamp, à la lisière du bois de Boulogne dominant l'hippodrome. Femmes, enfants, malades, vieillards sont assassinés dans les hôpitaux.

Lundi 22 mai : L’armée régulière installe de l'artillerie sur la colline de Chaillot et à l'Étoile. Les Parisiens montent des barricades mais la lutte est désordonnée. On se bat place de Clichy et aux Batignolles. En fin de journée, les « Versaillais » occupent l'Élysée, la gare Saint-Lazare, l'École militaire, où sont stationnés les canons de la Commune.

Mardi 23 mai : Puis, les « Versaillais » occupent l'Opéra, le faubourg Montmartre et la Concorde, ils atteignent l'Observatoire et procèdent à des exécutions massives à Montmartre, au parc Monceau et à la Madeleine. C’est le début des grands incendies qui vont ravager de nombreux monuments parisiens.

Mercredi 24 mai : Des immeubles d'habitation rue de Lille, Saint-Sulpice et du Bac sont en feu. Les dirigeants communards évacuent et font incendier volontairement l'hôtel de ville, la préfecture de police et le palais de justice. Les « Versaillais » investissent la Banque de France, le Palais-Royal, le Louvre, la rue d'Assas et Notre-Dame des Champs. Le quartier latin est attaqué ; il est occupé le soir et ses défenseurs (près de 700) sont exécutés rue Saint-Jacques. La poudrière du Luxembourg saute. À 12 h 30, le docteur Faneau, à la tête de l'ambulance établie au séminaire Saint-Sulpice, est passé par les armes avec 80 fédérés blessés.

Jeudi 25 mai : Les cinq dominicains d'Arcueil et neuf de leurs employés, soupçonnés de travailler pour « Versailles » et arrêtés le 19 mai sont abattus dans la prison du secteur, 38 avenue d'Italie.

Vendredi 26 mai : 11 prêtres, 36 gardes ou gendarmes versaillais et 4 civils travaillant ou manipulés par la police, détenus à la prison de la Roquette sont fusillées par un peloton d'exécution, avec l'approbation de la population présente (épisode de la « villa des Otages », rue Haxo). Massacre de communards au Panthéon. Le faubourg Saint-Antoine est contrôlé par les « Versaillais ».

Samedi 27 mai : Au cimetière du Père-Lachaise, on combat à l'arme blanche entre les tombes. Les « Versaillais », dirigés par le maréchal Mac Mahon, maîtres du lieu vers la fin de l'après-midi, y fusillent les 147 prisonniers contre un mur appelé, depuis lors, « mur des Fédérés ». Pendant la nuit les artilleurs de l’armée régulière tirent pour tenter d'incendier Belleville.

Dimanche 28 mai : Les combats se poursuivent dans Belleville. En début d'après-midi, les « Versaillais » prennent la dernière barricade des communards.

Lundi 29 mai : Le fort de Vincennes encerclé par les Allemands se rend. Les neuf officiers de la garnison sont fusillés dans les fossés près de l'endroit où fut exécuté le duc d'Enghien, prince de Bourbon, capturé outre-Rhin.

L'un d'eux, le colonel Delorme, se tourna vers le Versaillais qui commandait et lui dit : « Tâtez mon pouls, voyez si j'ai peur ».

C’est la fin de la commune… Elle a duré 72 jours.

REPRESSION

Le bilan officiel, rapporté par le général Appert devant l'Assemblée nationale en 1875, le , dans son rapport à l'Assemblée nationale, qui ne tient pas compte des condamnations prononcées en province, le général Appert dénombre 46 835 individus jugés, sur lesquels il y a 23 727 non-lieux, 10 137 condamnations prononcées contradictoirement, 3 313 condamnations prononcées par contumace, 2 445 acquittements et 7 213 refus d'informer.
Sur les 10 137 condamnations on dénombre 93 condamnations à mort (23 exécutions), 251 aux travaux forcés, 4 586 à la déportation (toutes en Nouvelle-Calédonie), 1 247 à la réclusion perpétuelle et 3 359 à des peines de prison variables. 55 enfants de moins de 16 ans sont envoyés en maison de correction.
Pour les contumaces, il y a 175 condamnés à mort, 159 aux travaux forcés, 2 910 à la déportation et 46 à la prison.

La plupart des prisonniers sont acheminés vers Versailles pour être internés au camp de Satory. Durant le voyage il y a des exécutions : le 31 mai, le journaliste du Times raconte que, devant lui, le général de Galliffet fait abattre 83 hommes et 12 femmes. De très nombreux témoignages racontent que, durant le trajet, les prisonniers sont injuriés et battus par des habitants de Versailles, sans que les soldats escorteurs n'interviennent.
Au camp de Satory, le calvaire continue : aucune hygiène, peu de soins pour les blessés, les épidémies se développent. On abat 300 prisonniers pour tentative de fuite dans la nuit du au . Les prisonniers condamnés à la déportation sont transférés dans les pontons et ports de l'Ouest de la France ; à Brest, Lorient, Cherbourg et Rochefort. Ces transferts se font dans des wagons à bestiaux dans des conditions sanitaires volontairement déplorables. Vingt convois, à destination la presqu'île Ducos (déportation en enceinte fortifiée), l'île des Pins (déportation simple) et le bagne de l'île de Nou (condamnés aux travaux forcés) se succèdent de 1872 à 1878, transportant un peu plus de 3 800 personnes, dans des conditions très pénibles. Les prisonniers sont enfermés dans de grandes cages dont ils ne sortent qu'une trentaine de minutes pour prendre l'air sur le pont avec des rations alimentaires faibles et de mauvaise qualité et des punitions fréquentes.

Ce n'est que le 11 juillet 1880, qu'avec l'appui tardif de Gambetta, alors président de la Chambre, l'amnistie pleine et entière est votée. Les exilés et les déportés peuvent alors revenir en France.

TENTATIVES DE BILAN

En 1876, le journaliste et polémiste socialiste Prosper-Olivier Lissagaray, ancien communard, rapporte que le conseil municipal de la ville de Paris paye l'inhumation de 17 000 cadavres, en prenant en compte les tués hors de Paris, il estime de 17 000 à 20 000 le nombre des fusillés (in L'histoire de la commune de 1871, rééd. La Découverte, 526 p. 2004).

En 1880, le journaliste et homme politique Camille Pelletan, membre du Parti radical-socialiste élève le nombre des victimes à 30 000 (La Semaine de Mai, 1880, p. 396).

L’historien britannique Robert Tombs, qui estime que les communards ont eu entre 6 000 et 7 500 morts, dont environ 1 400 fusillés (H-France Salon, « How bloody was la Semaine Sanglante ? A revision. Robert Tombs, St John’s College, Cambridge » et « Commentaire de Quentin Deluermoz, Université Paris 13/Nord » sur www.h-france.net).

Les Versaillais déplorent 877 tués, 6 454 blessés et 183 disparus dans les combats livrés du 3 avril au 28 mai (Jacques Rougerie, Paris insurgée, la Commune de Paris, p. 113).

Dans le même temps, les communards, en application du « décret des otages », fusillent 47 otages, dont l'archevêque de Paris Georges Darboy, arrêté le 4 avril 1871 avec quatre autres clercs et exécuté à la Roquette, à la suite de l'attaque versaillaise, le 24 mai. À cette exécution s'ajoutent celles des dominicains d'Arcueil et des jésuites de la rue Haxo.
La majorité des dirigeants de la Commune ont échappé à la mort au combat, aux exécutions sommaires et à la répression judiciaire (sur neuf membres du Comité de Salut public, seul Delescluze, est tué sur une barricade).

Les nombreuses destructions dans Paris sont imputables à la fois à l'âpreté des combats et aux incendies déclenchés par des commandos communards. La chronologie de ces destructions suit très précisément la reconquête de Paris par les troupes versaillaises : la colonne de la place Vendôme, surmontée par la statue de Napoléon, est abattue et démolie dès le 16 mai ; le 22 mai, le ministère des Finances ; dans la nuit du 23 au 24, le palais des Tuileries, symbole du pouvoir impérial de Napoléon III, le palais d'Orsay (où siègent le Conseil d'État et la Cour des comptes – les archives comptables disparaissent dans l'incendie) et l'hôtel de Salm ; le 24, le Palais-Royal (l'aile droite et une partie du bâtiment central), le Louvre (Bibliothèque impériale – 200 000 livres et manuscrits détruits) , l'hôtel de ville (la bibliothèque de l'hôtel de ville et la totalité des archives de Paris sont anéanties, ainsi que tout l'état civil parisien) et le palais de justice (si la Sainte-Chapelle échappe aux flammes, une grande partie des archives de la police est détruite) ; le 25, les greniers d'abondance ; le 26, les docks de la Villette et la colonne de la Bastille ; le 27, Belleville et le Père-Lachaise.
Les Archives nationales sont sauvées par l'initiative du communard Louis-Guillaume Debock, lieutenant de la Garde nationale parisienne et directeur de l'Imprimerie nationale sous la Commune, qui s'oppose in extremis à l'incendie ordonné par d'autres communards ; le palais du Louvre et ses collections échappent à la destruction grâce à l'action de Martian de Bernardy de Sigoyer, commandant les forces versaillaises du 26e bataillon de chasseurs à pied en faisant intervenir ses soldats pour empêcher que le feu ne se propage du palais des Tuileries au musée.

VISION HISTORIQUE

Pour l’historien François Furet :

« Aucun événement de notre histoire moderne, et peut-être de notre histoire tout court, n’a été l’objet d’un pareil surinvestissement d’intérêt, par rapport à sa brièveté. Il dure quelques mois, de mars à mai 1871, et ne pèse pas lourd sur les événements qui vont suivre, puisqu’il se solde par la défaite et la répression. […] Le souvenir de la Commune a eu la chance de se trouver transfiguré par un grand événement postérieur : la Révolution russe de 1917 l’a intégré à sa généalogie, par l’intermédiaire du livre que Marx avait consacré à l’événement dès 1871. […] Pourtant, la Commune doit beaucoup plus aux circonstances de l’hiver 1871 et au terreau politique français qu’au socialisme marxiste, auquel elle ne tient par rien. »

François Furet, La Révolution : de Turgot à Jules Ferry 1770-1880, Paris, Hachette, coll. « Histoire de France Hachette » (no 4),

Pour les historiens François Broche et Sylvain Pivot : 

« La Commune, dépourvue d'idées neuves, de valeurs fondatrices et de dirigeants d'envergure, ne fut jamais en mesure de précipiter l'enfantement d'un monde nouveau ».

Jean Sévillia, « La Commune, une utopie sanglante », Le Figaro Magazine, semaine du 30 novembre 2012

L'essayiste Alain Gouttman écrit dans La Grande Défaite (2015) : 

« Devant l'histoire, les communards se sont montrés le plus souvent médiocres, à quelque poste qu'ils se soient trouvés entre le 18 mars et le 26 mai 1871. Ils n'en incarnent pas moins, dans la mémoire collective, une grande cause, la plus grande de toutes peut-être : celle d'une société jaillie du plus profond d'eux-mêmes, où la justice, l'égalité, la liberté n'auraient plus été des mots vides de sens. Une utopie ? En tout cas, une grande espérance qui les dépassait de beaucoup, et dont ils furent à la fois acteurs et martyrs ».

La Commune a souvent depuis été revendiquée comme modèle — mais avec des points de vue différents — par la gauche marxiste, l'extrême gauche et les anarchistes ; elle a inspiré de nombreux mouvements, qui y ont cherché des leçons leur permettant d'entreprendre d'autres révolutions : la Révolution russe et les conseils (soviets), la Révolution espagnole et les collectivités, etc. Selon Karl Marx, la Commune est la seule période de l'histoire française durant laquelle fut — brièvement — réalisée une dictature du prolétariat.

Dans plusieurs autres villes de France (Marseille, Lyon, Saint-Étienne, Narbonne, Toulouse, Le Creusot, Limoges, Narbonne), des communes furent proclamées à partir du 23 mars 1871, mais furent toutes rapidement réprimées. Ces mouvements furent précurseurs des idées révolutionnaires qui amenèrent le monde du travail à s'organiser pour défendre ses intérêts et à créer la CGT en 1895.